Impacts environnementaux
L’impact Bti
Il est clair que la chute draconienne de la biodiversité est liée à plusieurs facteurs. L’un de ces facteurs sont les pesticides, qui sévissent dans la nature depuis de nombreuses années. En milieu agricole, vous aurez reconnu les néonicotinoïdes et en milieux naturels (tant ruraux qu’urbains), le Bti: un couple dévastateur.
Pour connaître les impacts d’un produit sur un milieu, il est essentiel de réaliser des recherches en comparant des zones témoins vs des zones impactées, en tenant compte notamment de la complexité des réseaux trophiques (Colbrun, E.A., Weeks,S.C. et S. K. Reed, 2007). Depuis qu’on utilise le Bti au Québec (plus de 25 ans), aucune étude de ce type n’a encore été réalisée chez nous.
Par contre, en raison d’interrogations qui vont croissantes un peu partout dans le monde, de telles études (certaines, en France, s’étalant sur plus de 12 ans) ont été réalisées.
Selon ces recherches (Rapport de 2013 de Brigitte Poulin), contrairement à ce qui est largement véhiculé dans les documents canadiens et québécois sur l’utilisation du Bti, ce biocide a un impact négatif sans équivoque sur la vie des milieux touchés. Les études françaises démontrent que l’utilisation du Bti affecte la biodiversité via la chaîne trophique. Plusieurs espèces se nourrissent des larves de chironomes, de moustiques et de mouches noires (ainsi que de ces insectes au stade adulte) depuis des millénaires et sont forcés, après pulvérisation de Bti, de trouver d’autres sources de nourriture.
Et qui se nourrit directement ou indirectement des chironomes? Des tas d’espèces puisque ces derniers sont à la base de la chaîne alimentaire dans les milieux aquatiques. On sait par exemple qu’à une période ou une autre de leur développement, les poissons se nourrissent de chironomes. Or, personne n’a, à ce jour, jamais étudié l’impact indirect du Bti sur les populations de poissons… en mal de chironomes. Si seulement les poissons pouvaient parler…
Extrait du rapport de Brigitte Poulin et al. par rapport aux chironomes:
Les chironomes sont très importants dans l’alimentation de plusieurs organismes. La décroissance de leurs populations affecte non seulement les hirondelles, mais aussi les libellules, les araignées, d’autres oiseaux et les chauves-souris en raison du manque de nourriture ou de la modification de leur régime alimentaire. (Synthèse de l’information sur l’utilisation du Bti, OBV des rivière Rouge, Petite-nation et Saumon, août 2015).
Voici des données tirées de la conférence de Brigitte Poulin ( B. Poulin, Montréal, juin 2019) pour les sites traités au Bti en Camargue (France):
- déclin de 34% des invertébrés servant de nourriture aux oiseaux dans les marais couverts de roseaux (les araignées et coléoptères étant particulièrement touchés)
- déclin de 50% des libellules
- perte du 1/3 des nichées d’hirondelles (mortalité des poussins suite à la consommation de fourmis qu’ils ne peuvent digérer)
- déclin de 52% des oiseaux d’eau, associé à la baisse des ressources alimentaires et au dérangement dû à la pulvérisation aérienne (corpus de 50 espèces sélectionnées).
On a voulu bien sûr étudier les effets sur les populations de chironomes, élément clé et base des réseaux trophiques des divers milieux aquatiques. Plus diversifiés et abondants que les moustiques, à l’état larvaire ils contribuent au recyclage de la matière organique et dans tous les stades servent de nourriture à de nombreux organismes aquatiques et terrestres. Résultat: l’effet du Bti s’est confirmé pour tous les habitats traités, par exemple: chute de 56% des chironomes dans les roselières.
En somme, tous les invertébrés, y compris les larves de moustiques et de mouches noires sont importants dans ces milieux.
Voici le détail (en anglais) des études de Brigitte Poulin et Gaëtan Lefebvre (2016)
et… pulvérisation ou pas, le sentiment de nuisance demeure.
Malgré la baisse des populations de moustiques et mouches noires après traitements, le sentiment de nuisance est quant à lui demeuré élevé.
Il s’agit de la première démonstration d’un effet marqué du Bti sur la faune non cible. Ces effets sont même plus importants que ceux généralement rapportés pour des insecticides chimiques pourtant beaucoup plus toxiques et moins sélectifs que le Bti. Même s’il n’affecte pas directement les oiseaux, la réduction de proies abondantes et essentielles à leur reproduction a des répercussions significatives sur leur abondance et survie. (Brigitte POULIN, PhD Chef département Ecosystèmes).
Impacts environnementaux des adjuvants? inconnus
Impossible d’évaluer les impacts dans les milieux aquatiques de tous les ingrédients ajoutés au Bti, soit les agents de protection contre les rayons UV, les émulsifiants, les anti-moussants, les stabilisateurs et phagostimulants puisque ces derniers sont protétégés par le secret commercial.
Voici la conférence de Brigitte Poulin.
Pour mieux connaître les espèces directement touchées, consulter le point 4. Bti, sélectif?
Questions:
- Dans le contexte actuel d’effondrement des espèces, selon quelles valeurs admettons-nous la pulvérisation d’un insecticide dans nos écosystèmes aquatiques?
- Quels impacts de tous ces adjuvants pulvérisés à répétition (normalement de la mi-avril à la mi-septembre) dans nos milieux aquatiques depuis de nombreuses années?